W

Créé le
Modifié le

30 visites

cg-seance3

Séance 3 : Le designer comme artiste

Papillon(s), Vanina Pinter

Vanina Pinter est une historienne du design graphique, critique, journaliste, enseignante et commissaire d'exposition française.
Lors de son double-cursus en Philosophie et en Histoire de l'Art, elle s'intéresse notamment à la question du féminisme dans l'art. Entre 2001 et 2007 elle est rédactrice-en-chef adjointe de la revue étapes en binôme avec Étienne Hervy. Elle participe à la revue en ligne Tombolo. Elle porte un intérêt tout particulier à la visibilité professionnelle des femmes, que ce soit dans son travail d'historienne, en tant qu'observatrice de l'actualité du design graphique, en tant que commissaire d'exposition ou comme enseignante : « que vais-je dire à mes étudiantes ? Coincées entre les rêves et la réalité… statistiquement, elles ont plus de chance de faire un stage qu’une affiche à Chaumont ».
Elle enseigne l'Histoire du design graphique à l'École supérieure d'art et design Le Havre-Rouen et a aussi enseigné à Orléans et à Reims.

L'affiche, comme elle annonce une temporalité, annonce obligatoire sa date d'expiration. Le Petit Robert définit même l'objet graphique comme « sujet à disparaître, éphémère, périssable, temporel ». Il y a des objets qui parfois sont parfois pensés comme intemporels (livres, identités visuelles, signalétiques), même si cette tendance se fait plus rare actuellement. Et tant mieux selon Vanina Pinter qui considère qu'envisager la postérité [d'un objet graphique], avant sa relation avec le public est inconvenant.

Le design graphique se distingue de l'art précisément en pensant des objets graphiques qui s'inscrivent dans un ici et maintenant.

Affiche présentant une photographie couleur d'une vitrine à 4 étages en verre. Sur chaque étage sont présentés des bibelots (théière, coupelle, pochette de CD, etc.) peu identifiables. Par-dessus la photo, le titre de la pièce est inscrit avec une fonte didone et « Hamlet » en une fonte expérimentale 3D.

Vanina Pinter identifie trois stratégies développées par les graphistes pour lutter contre l'effacement et faire des propositions au-delà de la consommation, essentielles, fonctionnelles et radicales :

Jean-François Lyotard affirme qu'il y a trois fonctions à l'affiche : persuader, témoigner et plaire, et que l'exposition d'une affiche lui retire ses deux premières fonctions, lui faisant perdre son assise sociale et la transformant en un objet d'art. Pour Vanina Pinter, exposer permet d’accorder à l’oeuvre, une écoute différente, singularisée et de réinventer des dialogues entre ses différentes fonctions.

Pour que les objets graphiques soient moins flottants et offerts au pouvoir du commissaire, certain·es graphistes s'appliquent à montrer le processus de création d'une œvre exposée.

Un papillon désigne en design graphique un objet imprimé sur « petit texte de publicité ou de propagande que l’on distribue ou que l’on colle » (Petit Robert toujours). Vanina Pinter : « dans un livre, comme dans la rue, le papillon est seul, jeté au bon vouloir de la réception du lecteur ».

L'affiche ne peut, de son vivant, être analysée ou contemplée.

« Le papillon de Fanette Mellier existe en deux versions, l’une comportant les informations de l’exposition Un Imprimeur – Saison graphique, 2013 –29, l’autre dénuée de toute information. » --> Toute une partie de l'article est dédiée à l'analyse de cette commande en particulier.

La minimalisation du contenu serait selon Vanina Pinter une démarche propre aux graphistes qui leur permet de créer des objets de non-contrôle, qui invitent à l'autonomie de [leurs] lecteurs.

« quand vous voyez des peintures ou des photographies prises dans l’intention de faire une oeuvre d’art, vous ne pouvez pas tourner la page. Il faut s’arrêter dessus, y revenir » Jean-Luc Nancy, La beauté, les petites conférences, Bayard, 2009 p.29

Pour Vanina Pinter, l'exposition d'affiches répond au savoir pertin[ent] que quelque chose ne s'est pas épuisé.