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lucie-notesmemoire

Du coup pour l'instant je bosse sur le corpus avec Corrine.
Donc c'est surtout desrecherches et des ressentis sur ces références.

- Refik Anadol - Machine Hallucination

-Refik Anadol est un pionnier de l’art immersif numérique. Dans Machine Hallucinations, il utilise des algorithmes d'intelligence artificielle pour créer des œuvres à partir de vastes bases de données visuelles. Par exemple, des images de bâtiments ou de paysages urbains sont analysées pour générer des environnements oniriques et distordus qui se transforment en temps réel. Voir la vidéo
-La façon dont l’espace est "augmenté" joue avec la perception visuelle et émotionnelle des spectateurs. Les changements constants dans les visuels engagent le spectateur dans une expérience presque hypnotique, créant un lien entre la mémoire collective des images et l’interprétation personnelle.
-Anadol développe une nouvelle forme de scénographie numérique, dans laquelle le spectateur est plongé dans un tableau en constante évolution, ce qui perturbe les notions traditionnelles d'observation statique. Cela pourrait t’inspirer pour étudier comment le numérique transforme les limites de la scénographie et crée une "théâtralisation du regard" où le spectateur devient acteur de sa propre perception.
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- Les carrières de lumières, les beaux de Provence.

-Les carrières de lumières sont visuellement impressionnantes, mais manquer
de profondeur conceptuelle. Pourquoi ce besoin d’occuper un aussi grand espace? Pourquoi être surstimulé. J’ai ressenti un vide derrière ces projection, pas de narration ni d’histoire.

-Manque d’impact en visitant carrières des lumières, limites de l’interactivité purement esthétique. Pourquoi cette interactivité a échoué à captiver un engagement émotionnel ou intellectuel?

-L’interaction en scénographie numérique : est-ce que l’esthétique immersive suffit pour créer une relation significative avec le spectateur ? Explorer des alternatives plus nuancées où l’interaction vise à créer une réflexion au-delà de l'effet visuel.
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- Tobias Gremmler - Art et mise en scène spatiale

-Tobias Gremmler est un designer qui utilise des techniques de modélisation numérique et d’animation pour créer des espaces qui réagissent aux mouvements de l’art, comme les arts martiaux ou la musique. Ses œuvres explorent la relation entre l’espace scénique et le corps en mouvement.

-Dans ses œuvres, l’espace numérique devient malléable et semble réagir au mouvement, redéfinissant ainsi la perception du spectateur. Le mouvement physique est amplifié par des projections visuelles, et le spectateur est transporté dans un espace virtuel qui transcende les limites physiques.

-L’espace scénographique peut se transformer en fonction des mouvements, Gremmler offre un exemple concret de la fusion du corps et du numérique. Comment la scénographie peut être pensée non seulement comme un décor, mais comme un espace qui "réagit" et qui s'adapte au spectateur?

- Merce Cunningham et le logiciel LifeForms

-Cunningham, un pionnier de la danse contemporaine, a intégré l’outil LifeForms dans les années 80 pour développer des chorégraphies assistées par ordinateur. Il l’utilisait pour imaginer des mouvements complexes, en expérimentant des combinaisons de mouvements.

-Les œuvres de Cunningham montrent une danse dont les mouvements sont influencés par le numérique, créant une esthétique chorégraphique unique et visuellement captivante. Les spectateurs perçoivent une continuité entre la technologie et la physicalité du mouvement.Article sur son travail

-Cunningham pose les bases d’une scénographie augmentée, où les logiciels influencent la création et la perception de l’espace scénique. Approfondir la relation entre corps, mouvement, et espace numérique? Scénographies où le numérique n’est pas seulement une projection, mais outil de création.

- Theorise Studio, Villeurbanne (ref de Corentin)

-Les installations interactives de Villeurbanne offrent des espaces où les spectateurs modifient l’environnement par leur simple présence. Ces œuvres mettent le spectateur en position d’acteur, où il peut jouer un rôle dans le récit spatial.

-En agissant dans un espace interactif, le spectateur devient co-créateur de l’œuvre. Les installations de Villeurbanne invitent les visiteurs à entrer dans un univers numérique qui réagit en temps réel à leur passage, renforçant l’immersion.

-Ces installations montrent comment l'interactivité peut être intégrée pour transformer l’espace scénographique. Dans ton mémoire, cela pourrait illustrer comment la co-création du spectateur donne un nouveau rôle à l’espace scénique, techniques permettant cette interaction en temps réel.

- Élisabeth Caravella - Computer Grrrls et l’œuvre "How To? » (encore Corentin merce pour la ref)

-Dans Computer Grrrls, Caravella présente une vidéo tutorielle qui explore la relation entre femmes et technologies, à travers des tutos.

-Les spectateurs se retrouvent face à une présentation visuelle à la fois éducative et critique. Elle les pousse à questionner l’histoire et les représentations de la technologie, en utilisant un format accessible, celui du tutoriel.

-Comment des formats didactiques numériques deviennent des éléments scénographiques?

- James Turrell au Grand Palais (rholala tjrs Corentin)

-James Turrell explore la perception sensorielle à travers la lumière. Son œuvre Confluence au Grand Palais transforme la perception de l’espace en modulant les sources de lumière pour créer des effets visuels d’expansion ou de réduction d’espace.

-Joue avec la perception, utilise des techniques de lumière qui brouillent les frontières entre le physique et le virtuel. Espace illusoire. Voir son travail

- Laerk Lillelund.

-Création de biomes à partir de matières recyclées
Son site internet

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EXPOS CRITICABLES?

Des pbs au niveaux des structures et expo telles que les bassins de lumière bordeaux, les carrières de lumière aux beaux de Provence ou encore le teamlab à Tokyo.

-Peu engageantes au niveau de l’interaction.
-Reproductions d’œuvres classiques ou modernes, reformatées pour le numérique mais
sans dialogue profond avec le lieu.
-Confine l’art à une reproduction visuelle plutôt qu'à une réelle expérience artistique.
-Diaporamas géants, ne modifie pas la perception.
-Approche superficielle.
-Installations répétitives, manque de profondeur conceptuelle.
-L’interaction reste souvent limitée aux mouvements simples du spectateur, comme le
toucher ou le déplacement. Cela réduit le spectateur à un simple « déclencheur d’effets »
plutôt qu'à un véritable acteur de l’œuvre.
-se concentrent principalement sur l’esthétique visuelle.
-Cet accent sur la beauté et l’expérience immersive sans profondeur théorique crée un
effet de superficialité, une impression forte mais éphémère, avec peu de réflexion
duravble.
-Art consommable.
-Oeuvres projetées comme des décors plutôt que d’être intégrées dans une
réflexion sur la spatialité ou l’interaction.
-Approche relativement statique et linéaire.
-privilégie des choix artistiques « faciles » et grand public, qui laisse peu de place à la
réflexion personnelle et au contexte critique.
-Une scénographie finalement très limitée.
Site de teamlab
Site des carrières des lumières
Site du bassin des lumières

J'ai avancé un peu en essayant d'avoir un plan clair (pas sure de tout j'attends les retours de Corinne).

Mémoire rendu du 12/11

Mini Intro:

Dans une actualité où les technologies immersives et les nouveaux médias transforment notre manière de percevoir l'art et l'espace, la scénographie numérique a pris une place prépondérante. À travers des dispositif et des installations visuellement engageantes, des événements comme la Fête des Lumières de Lyon ou les œuvres de Refik Anadol captivent un public de plus en plus large. Cependant, cette fascination soulève des questions cruciale : comment ces expositions influencent-elles notre perception de l'espace ? Sont-elles de simples expériences décoratives, ou peuvent-elles engager une dimension plus profonde, capable d'interroger la place du spectateur et de l'œuvre ? Mon mémoire se propose d'explorer ces enjeux, en mettant en balance les aspects sensoriels des expositions immersives et les critiques qui en découlent.

Problématique(s):

-En quoi les scénographies augmentées par les nouveaux médias oscillent-elles entre une expérience purement décorative et une dimension artistique engageante, capable de solliciter une réflexion critique de la part du spectateur ?
-Comment l’utilisation de technologies numériques peut-elle soit enrichir, soit réduire la profondeur d’une œuvre scénographique, en termes de mise en scène, de rapport au corps et d’interaction avec l’espace ?

Pré-plan:

Introduction:
-Présentation du sujet et de la problématique
-Importance de la question à l’ère des nouveaux médias
-Objectifs et enjeux du mémoire

Chapitre 1 : Regard critique sur les expositions immersives
-Analyse des Carrières de Lumières, TeamLab, et de la Fête des Lumières de Lyon
-Déconstruction des installations purement décoratives : pourquoi ces expériences séduisent-elles le public sans susciter de réflexion critique ?
-Comparaison avec la muséographie traditionnelle : exposition contemplative vs expérience sensorielle
-Réflexion à partir du livre Le Décoratif de Jacques Soulilou : exploration des frontières entre décoration et œuvre d’art
———————>Amène doucement à la transition, on passe grâce au livre « le décoratif » à la machine hallucination (tableau mais en mouvement, pourquoi ce n’est pas la même chose qu les carrières des lumières etc)

Chapitre 2 : Refik Anadol et la machine hallucinatoire
-Présentation des œuvres de Refik Anadol, en particulier Machine Hallucination
-Transition avec des dispositifs d’immersion des années 50 : analyse des machines immersives de l’époque (Charles et Ray Eames, Nicolas Schöffer, Jordan Belson etc)
-En quoi les installations de Refik Anadol diffèrent-elles ou prolongent-elles cette tradition ?
-Critique de l’esthétique algorithmique : spectacle visuel ou réelle profondeur artistique ?
——————> Transition en retournant dans les années 40-50 avec Merce Cunningham et ses logiciels.

Chapitre 3 : Chorégraphie numérique et théâtre augmenté
-Exploration des travaux de Merce Cunningham et de l'utilisation des logiciels de chorégraphie : quand la danse et le numérique se rencontrent
-Introduction à Tobias Gremmler : sa mise en scène numérique et le rapport entre corps humain et espace scénique (découle de Cunningham)
-Analyse des interactions entre le corps et l’espace dans la scénographie numérique
-Réflexion sur la théâtralisation du regard et la mise en scène, en s'appuyant sur Jerzy Grotowski (Vers un théâtre pauvre) et Peter Brook (The Empty Space)
——————> Utiliser Erin Manning (Relationscapes) qui parle du corps avec sa théorie du pré mouvement comme transition.

Chapitre 4 : Autour du corps dans l’espace scénographique
-Étude de l’organicité et de la physicalité dans la scénographie augmentée
-Influence des théoriciens comme Jerzy Grotowski sur la perception et la présence corporelle dans l’espace scénique
-Critique des approches minimalistes de Gwenaël Morin et leur opposition aux artifices numériques
-Le corps du spectateur : participation passive ou interaction active ?(spectateur ou acteur)
-Conclusion sur la théâtralisation du corps et les nouvelles pratiques de scénographie numérique (pas sure)

Conclusion:
-Synthèse des réflexions
-Perspectives pour des pratiques scénographiques qui équilibrent le numérique et le sensoriel de manière critique
-Lancer la reflexion sur la suite et mon projet de diplôme (utiliser le mémoire comme une introduction?)

Ma (petite) bibliographie en l’état:

-Soulilou, Jacques, Le Décoratif : Exploration des limites entre décoration et œuvre d’art, fondamental pour critiquer les expositions immersives.

-Grotowski Jerzy, Vers un théâtre pauvre : performance organique, importance de la simplicité.

-Brook Peter - The Empty Space : concepts de vide et de théâtralité.

-Ouvrages et articles sur Merce Cunningham et l’utilisation de logiciels de chorégraphie dans la création artistique.

-Publications sur Tobias Gremmler : exemple pour lien entre numérique et espace scénique.

-Revue « Variations autour du geste théâtral » : Complément analyse des approches alternatives dans la mise en scène théâtrale.
-Erin Manning, Relationscapes: théorie du pré mouvement.

-Christiane Paul, , L’art digital: 4eme de couv« Les technologies numériques ont révolutionné la production et la réception de l'art. L'auteure s'attache à décrire l'évolution de l'art numérique depuis son apparition dans les années 1980 et propose des pistes quant à son avenir. Panorama des oeuvres et artistes clés du numérique »

Sitographie:

-https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/par-les-temps-qui-courent/gwenael-morin-meme-si-le-theatre-c-est-voir-il-ne-faut-pas-montrer-pour-autant-4485567

-https://refikanadol.com/

-https://www.teamlab.art/

-https://www.dam.org/

-https://www.mappingfestival.com/

-https://v2.nl/

Du coup je commence doucement à rédiger le mémoire, voila ou j'en suis:

Introduction :

Dans une actualité où les technologies immersives et les nouveaux médias transforment profondément notre manière de percevoir l’art et l’espace, la scénographie numérique occupe une place prépondérante dans le paysage culturel contemporain. Qu’elles prennent la forme d’expériences grand public, comme la Fête des Lumières de Lyon, ou de créations artistiques plus expérimentales, comme celles de Refik Anadol ou de Tobias Gremmler, ces nouvelles formes scénographiques redéfinissent le dialogue entre le spectateur, l’espace et l’œuvre. Si elles captivent les foules grâce à leur puissance visuelle et sensorielle, elles soulèvent également des questions essentielles : ces dispositifs immersifs sont-ils de simples outils de décoration, visant à émerveiller, ou peuvent-ils engager une réflexion critique sur l’art, l’espace et le rôle du spectateur ?
La place du spectateur, qu’il soit absorbé dans une contemplation passive ou sollicité pour interagir, constitue un axe fondamental de ce mémoire. Dans une scénographie numérique, où l’espace est habillé et transfiguré par des dispositifs technologiques, la perception du spectateur devient le centre névralgique de l’expérience. Mais cette centralité est-elle réelle ou illusoire ? Dans des installations visuellement captivantes comme celles des Carrières de Lumières ou des œuvres de TeamLab, le spectateur se retrouve souvent en position de simple récepteur, fasciné par la monumentalité des projections. Cette passivité contraste avec des formes plus intimistes et expérimentales, comme les chorégraphies augmentées de Merce Cunningham ou les explorations théâtrales de Jerzy Grotowski, où le spectateur est invité à s’engager activement, parfois même physiquement, dans l’espace scénographique.
Les formes abordées dans ce mémoire s’articulent autour de trois grands axes : les dispositifs immersifs dans l’espace public, comme ceux de la Fête des Lumières ou des Carrières de Lumières ; les chorégraphies numériques, illustrées notamment par le travail de Cunningham et Tobias Gremmler ; et enfin, la projection des corps, à travers des œuvres qui questionnent la relation entre l’organicité et le numérique, le tangible et le virtuel. Ces formes, bien qu’apparemment disparates, partagent un questionnement commun : comment le numérique reconfigure-t-il notre manière de percevoir l’espace, le corps et la mise en scène ?
En analysant des œuvres et dispositifs issus de ces trois champs, ce mémoire entend interroger les effets des technologies numériques sur la profondeur des œuvres scénographiques. L’utilisation de ces technologies peut, d’une part, enrichir l’expérience en multipliant les interactions entre le spectateur et l’espace scénique, en rendant visible l’invisible ou en transformant l’espace en une matière dynamique et mouvante. Mais, d’autre part, elle peut également réduire les œuvres à des expériences purement visuelles, où la profondeur artistique et réflexive est éclipsée et remplacée par une esthétique algorithmique et spectaculaire.
En mobilisant une approche critique, ce mémoire propose de déconstruire les scénographies numériques sous deux angles principaux : leur conception, c’est-à-dire les intentions artistiques et technologiques qui les sous-tendent, et leur réception, c’est-à-dire la manière dont le spectateur les perçoit et interagit avec elles. Ces réflexions seront ancrées dans une analyse de l’évolution des dispositifs immersifs, depuis les expérimentations des années 1950, comme celles de Charles et Ray Eames ou de Jordan Belson, jusqu’aux œuvres contemporaines de Refik Anadol et Tobias Gremmler. Les concepts théoriques développés par des penseurs comme Jacques Soulilou (Le Décoratif), Jerzy Grotowski (Vers un théâtre pauvre), ou Erin Manning (Relationscapes), viendront enrichir cette réflexion en éclairant les tensions entre décoratif et critique, passivité et interaction, matérialité et immatérialité.
Ce mémoire vise également à mettre en lumière les enjeux spécifiques de la scénographie dans les différents contextes étudiés : l’espace public, où les foules sont souvent passives face à des spectacles immersifs ; la danse, où le numérique dialogue avec la physicalité et l’organicité des corps en mouvement ; et le théâtre, où la projection des corps numériques interroge la mise en scène et la théâtralisation du regard. Ces trois contextes seront abordés comme des exemples des défis et opportunités qu’offre la scénographie augmentée par les nouveaux médias.
Ainsi, ce travail explore les tensions entre émerveillement sensoriel et réflexion critique, entre décoratif et artistique, entre spectateur passif et acteur engagé. À travers l’étude de dispositifs immersifs, ce mémoire interroge la manière dont le numérique transforme notre rapport à l’espace, au corps et à l’art.

Chapitre 1 : Les expositions immersives entre décoration et expériences sensorielles, approche critique

Depuis quelques années, les expositions immersives connaissent un grand engouement. Des installations comme les Carrières de Lumières aux Baux-de-Provence, les spectacles lumineux de la Fête des Lumières de Lyon ou encore les œuvres interactives de TeamLab attirent un public toujours plus large, grâce à des dispositifs qui enveloppent le spectateur dans un univers visuel et sonore spectaculaire. Ces expériences proposent des immersions totales dans des mondes numériques où les murs deviennent des toiles mouvantes et les espaces, des environnements sensoriels captivants. Cependant, au-delà de leur impact esthétique indéniable, une critique récurrente émerge : ces expositions privilégieraient la fascination visuelle au détriment de la profondeur artistique, reléguant souvent leur ambition à une simple quête décorative.
Les Carrières de Lumières illustrent bien cette tendance à l’immersion spectaculaire. Proposant des projections monumentales d’œuvres classiques, comme celles de Van Gogh ou Cézanne, accompagnés de musiques envoûtantes, elles plongent le spectateur dans une atmosphère qui éblouit par son intensité sensorielle. Pourtant, ce dispositif peut aussi être critiquer pour son manque d’engagement critique : le spectateur, réduit à un rôle passif, se contente de suivre une scénographie prédéfinie où l’interaction avec les œuvres est inexistante. Cette passivité suscite des interrogations sur le rôle véritable de ces expositions : sont-elles des vecteurs d’éducation artistique ou de simples spectacles visuels destinés à émerveiller les foules ?
De même, les installations de TeamLab, bien que plus interactives, s'inscrivent souvent dans une logique ludique qui exploite la technologie pour stimuler des réactions immédiates et instinctives. Le public est invité à toucher, explorer et parfois influencer les projections, mais rarement à engager une réflexion critique sur l'œuvre ou sur son propre rôle en tant que spectateur. Ce type d’expérience semble s’inscrire davantage dans une recherche d’effet immédiat, où le décoratif prime sur une véritable profondeur artistique.
La Fête des Lumières de Lyon, bien qu’elle se déploie dans l’espace public et mobilise des technologies innovantes, suit une logique similaire. Les installations lumineuses, souvent éphémères, transforment la ville en un théâtre visuel géant, mais elles le font souvent sans interroger le contexte urbain ou les problématiques sociales et culturelles qu’elles investissent. Le public, subjugué par les jeux de lumière et les couleurs, traverse ces espaces sans nécessairement se poser de questions sur le sens ou la portée de ces interventions.

Ces installations se démarquent radicalement de la muséographie traditionnelle, qui repose sur une contemplation statique et intime des œuvres. Là où une exposition classique incite à l’analyse et à l’introspection, ces dispositifs immersifs privilégient une approche sensorielle immédiate. Cette dichotomie rappelle les distinctions établies par Jacques Soulilou dans son ouvrage Le Décoratif. Pour Soulilou, le décoratif renvoie à une fonction ornementale, séduisante mais souvent vide de contenu, tandis que l’œuvre d’art engage une réflexion qui dépasse sa matérialité. À travers cette grille de lecture, on pourrait affirmer que ces expositions immersives tendent vers le décoratif, en substituant à la profondeur artistique une superficialité spectaculaire.
Cependant, certains artistes contemporains comme Refik Anadol repoussent ces limites en explorant la frontière entre décoration et création artistique critique. C’est en cela qu’une œuvre comme Machine Hallucination s’inscrit dans un dialogue plus complexe.

Refik Anadol, artiste et innovateur, incarne une autre vision de l’immersion numérique. Avec des œuvres comme Machine Hallucination, il propose une expérience où l’esthétique visuelle ne se limite pas à l’émerveillement, mais cherche à interroger le spectateur sur sa perception, sa mémoire et sa relation à l’espace. Machine Hallucination utilise des algorithmes pour générer des paysages abstraits à partir de données visuelles issues de la mémoire collective. Ces paysages, en mouvement constant, sollicitent le spectateur de manière plus complexe : ils ne se contentent pas d’éblouir, mais questionnent l'interaction entre l’humain, la machine et l’art.
Contrairement aux Carrières de Lumières, où les œuvres projetées conservent leur statut d’objets d’art préexistants, Anadol crée des œuvres inédites qui intègrent la technologie et l’intelligence artificielle dans leur processus créatif. Cela dépasse l’approche purement décorative pour atteindre une profondeur artistique, où la technologie devient un outil d’exploration. Le spectateur, bien qu’entouré d’images fascinantes, est invité à réfléchir à la manière dont ces images sont générées, à leur lien avec le réel et à leur potentiel de transformation de la perception.

Pour comprendre ce qui différencie les œuvres de Refik Anadol des installations décoratives, il est pertinent de les replacer dans une continuité historique. Les machines immersives des années 1950, comme celles de Charles et Ray Eames, ou les explorations visuelles de Jordan Belson, ont initié une réflexion sur le rapport entre l’image projetée, l’espace et le spectateur. Ces dispositifs, bien que rudimentaires par rapport aux technologies actuelles, visaient déjà à créer des expériences multisensorielles où la projection devenait un médium dynamique.
Ainsi, Machine Hallucination peut être perçue comme une extension de ces expérimentations, mais avec une dimension algorithmique plus poussée. Là où les installations des années 1950 exploitaient des projections statiques ou animées pour plonger le spectateur dans un environnement immersif, Anadol mobilise des outils numériques pour générer des paysages en constante évolution, où l’algorithme devient lui-même acteur de la scénographie.
Cette évolution soulève une critique importante : l’esthétique algorithmique de ces œuvres contemporaines offre-t-elle une véritable profondeur artistique, ou se contente-t-elle de séduire par sa technicité ? Ces questions nous ramènent à la frontière ténue entre émerveillement visuel et engagement critique.

Chapitre 2 : Chorégraphie numérique et théâtre augmenté

Les œuvres immersives de Refik Anadol, à travers leur exploration des frontières entre l’art et la technologie, introduisent une réflexion sur le rapport entre le corps humain et l’espace numérique. En transformant des données en paysages abstraits, Anadol place le spectateurs au cœur d’un dialogue où son regard, ses déplacements et ses perceptions deviennent des éléments de la mise en scène. Cette approche ouvre la voie à une interrogation plus vaste : comment les outils numériques redéfinissent-ils le rôle du corps dans la scénographie contemporaine ? Pour répondre à cette question, il est essentiel de revenir à l’une des figure pionnière de cette rencontre entre corps et technologie : Merce Cunningham.
Merce Cunningham, chorégraphe visionnaire du XXe siècle, a été l’un des premiers à intégrer les outils numériques dans le processus créatif de la danse. Dès les années 1990, il utilise LifeForms, un logiciel de chorégraphie qui lui permet de concevoir des mouvements dépassant les limites physiques du corps humain. Grâce à cet outil, Cunningham invente de nouvelles formes de déplacement et de relations spatiales, redéfinissant le rôle du danseur et sa place dans l’espace scénique.
Cette approche ne consiste pas seulement à reproduire la chorégraphie humaine dans un environnement numérique, mais à imaginer des interactions inédites entre corps et espace. Les logiciels deviennent des partenaires créatifs, générant des idées que le chorégraphe peut adapter ou interpréter. Pour Cunningham, le numérique n’est pas un simple outil, mais une extension de la pensée chorégraphique, permettant de matérialiser l’invisible et d’explorer le potentiel latent du mouvement.
En plaçant la technologie au service de la danse, Cunningham ouvre une nouvelle perspective sur la scénographie : le corps, libéré de certaines contraintes physiques, devient un élément malléable, capable de s’intégrer dans des espaces augmentés où le réel et le virtuel se confondent.
L’héritage de Cunningham trouve une résonance dans le travail de Tobias Gremmler, artiste et designer numérique, qui poursuit cette exploration des interactions entre corps humain et espace scénique. Gremmler utilise des technologies de capture de mouvement pour déformer, étirer ou fragmenter les corps dans ses créations numériques, transformant ainsi les danseurs en entités hybrides à la croisée de l’humain et du virtuel.
Dans ses œuvres, le corps devient une force plastique qui dialogue avec l’espace, non plus comme un élément fixe mais comme un flux en perpétuelle transformation. Ses projections numériques ne sont pas de simples décors, mais des prolongements des mouvements des danseurs, inscrivant les corps dans une chorégraphie élargie qui englobe l’entièretée de l’espace scénique. Par exemple, dans certaines performances, les gestes des interprètes génèrent des formes abstraites projetées autour d’eux, créant un environnement visuel où l’interaction entre le corps et l’espace devient centrale.
L’approche de Gremmler prolonge celle de Cunningham en élargissant la définition de la chorégraphie : il ne s’agit plus seulement de structurer les mouvements dans un espace donné, mais de créer un dialogue dynamique où le corps humain et les technologies numériques co-construisent une expérience scénique.
Ces interactions entre le corps et l’espace dans la scénographie numérique amènent à repenser la place du spectateur. Comme le soulignent Jerzy Grotowski dans Vers un théâtre pauvre et Peter Brook dans The Empty Space, le théâtre est avant tout une rencontre entre l’acteur, l’espace et le spectateur. Dans les dispositifs numériques, cette rencontre est transformée : le spectateur devient non seulement un témoin, mais parfois un acteur indirect, influençant les projections ou les mouvements à travers son positionnement ou ses réactions.
Grotowski insiste sur l’importance de réduire le théâtre à son essence, en supprimant les artifices superflus pour mieux mettre en lumière la relation entre le corps de l’acteur et le regard du spectateur. À l’inverse, les dispositifs numériques, en multipliant les couches visuelles et interactives, enrichissent cette relation tout en la complexifiant. Le regard du spectateur est dirigé, parfois manipulé, par les projections et les mouvements numériques qui envahissent l’espace. Cette théâtralisation du regard, où la perception est activement mise en scène, devient une composante clé de la scénographie numérique.
Peter Brook, dans son concept de l’espace vide, défend une mise en scène qui libère l’imaginaire du spectateur. Les dispositifs numériques comme ceux de Gremmler ou Cunningham peuvent être perçus comme une évolution de cette idée : l’espace scénique, loin d’être un cadre fixe, devient un environnement en mouvement où le spectateur projette ses propres interprétations.
Pour approfondir cette réflexion, Erin Manning propose une théorie qui éclaire le rôle du corps dans ces dispositifs numériques. Dans Relationscapes, elle développe le concept de « pré-mouvement », qui désigne les potentialités du mouvement avant qu’il ne se réalise. Selon Manning, le corps n’est pas un objet stable, mais un réseau d’interactions en devenir, toujours en tension entre ce qui est et ce qui pourrait être.
Appliquée à la scénographie numérique, cette théorie souligne l’importance des relations dynamiques entre le corps, l’espace et les technologies. Les œuvres de Gremmler ou de Cunningham ne figent pas le mouvement, mais en révèlent les potentialités qui pourraient en découlé, transformant le spectateur en un participant actif de cette exploration.
Ainsi, la chorégraphie numérique et le théâtre augmenté offrent des possibilités inédites pour redéfinir la place du corps dans l’espace scénique. Grâce aux outils numériques, le corps peut devenir une force dynamique qui va plus loin que les limites de la physicalité, engageant le spectateur dans une expérience où l’imaginaire et la perception sont activement sollicités.

Chapitre 3 : Autour du corps dans l’espace scénographique

Dans la scénographie contemporaine, l’interaction du spectateur occupe une place centrale, notamment grâce à l’intégration des technologies numériques qui redéfinissent les relations entre le corps et l’expérience artistique. Ce chapitre explore comment la scénographie augmentée invite le spectateur à engager une relation plus active avec son environnement, et comment les théories de la physicalité et de l’organicité façonnent cette interaction.
La scénographie augmentée s’appuie sur une approche qui intègre des éléments physiques et numériques pour créer des environnements immersifs et dynamiques. L’organicité de l’espace scénique devient une métaphore des relations complexes entre le corps et l’environnement, tout en passant au dela des limites physiques traditionnelles. Des théoriciens comme Jerzy Grotowski, dans son exploration du théâtre pauvre, soulignent l’importance de la présence corporelle et de l’interaction directe entre l’acteur et le spectateur. Pour Grotowski, chaque mouvement du corps porte en lui une charge émotionnelle qui passe outre les frontières de la représentation traditionnelle.
Dans le cadre de la scénographie augmentée, cette approche se transpose à une échelle élargie. Le spectateur devient un participant actif, influençant l’expérience à travers ses déplacements, sa perceptions et ses interactions avec l’espace. La physicalité du corps, au-delà de sa simple apparence visuelle, devient un vecteur d’expression et de dialogue entre le spectateur et l’œuvre.
Cependant, certaines pratiques scénographiques minimales, comme celles de Gwenaël Morin, opposent une approche dépouillée aux artifices numériques. Ces dispositifs privilégient une simplicité formelle où la concentration repose sur la réduction des éléments visuels et sur une intensification du rapport physique entre le spectateur et l’espace scénique. Dans cette perspective, le numérique n’est pas nécessairement l’élément central, mais devient un outil au service de l’expérience corporelle et sensorielle.
Cette tension entre le minimalisme et les artifices numériques soulève une question fondamentale : le spectateur est-il un acteur passif ou un acteur interactif ? Alors que les installations numériques offrent des environnements riches et souvent surchargés d’informations visuelles, elles risquent de submerger le spectateur, réduisant ainsi son rôle à une simple observation passive. À l’inverse, les dispositifs minimalistes encouragent une interaction plus consciente, guidée par une relation directe avec l’espace et le corps.
Dans les scénographies augmentées, le spectateur n’est plus seulement un témoin passif, mais devient souvent un acteur indirect ou actif de l’expérience. Les technologies permettent d’adapter l’environnement en fonction de ses déplacements, de ses choix ou de ses réactions, rendant l’interaction plus engageante. Cette dynamique entre le spectateur et l’espace scénographique transforme l’expérience en une exploration collective, où la frontière entre acteur et spectateur devient floue et réduite.
Cependant, cette immersion peut parfois soulever des préoccupations éthiques et critiques sur le rôle du spectateur. Jusqu’où l’interaction numérique enrichit-elle l’expérience sans devenir une intrusion technologique excessive ? Comment préserver une certaine liberté dans l’interprétation sans que les données générées ne définissent trop rigidement les comportements ou les perceptions ?
Le spectateur devient ainsi à la fois un acteur et un récepteur d’une expérience où chaque mouvement, chaque regard, chaque émotion est pris en compte pour construire une scénographie qui dépasse les limites traditionnelles du théâtre.

La scénographie augmentée ouvre des perspectives nouvelles sur la place du corps dans l’espace scénique, où le spectateur n’est plus simplement observateur, mais un participant intégral à l’œuvre. La théâtralisation du corps, selon les principes de Jerzy Grotowski et Peter Brook, se retrouve dans ces dispositifs numériques où chaque interaction devient une composante active du spectacle.
La scénographie numérique ne se contente pas d’ajouter une couche visuelle à l’expérience, mais stimule une réflexion sur la physicalité du corps dans l’espace, sur les interactions organiques et sur l’impact des nouvelles technologies sur la présence corporelle. Ainsi, cette évolution contribue à transformer les pratiques scénographiques contemporaines en proposant une nouvelle forme d’art où le corps, l’espace et le spectateur sont indissociables.

Conclusion

Ce mémoire a exploré les différentes dimensions de la scénographie augmentée, en mettant en lumière les enjeux esthétiques, interactifs et critiques qui entourent l’intégration des technologies numériques dans les pratiques scénographiques contemporaines. À travers l’analyse de dispositifs immersifs, des œuvres de Refik Anadol et de Merce Cunningham, ainsi que des approches minimalistes, il est apparu que la scénographie numérique peut osciller entre une dimension purement décorative et une expérience engageante qui sollicite une réflexion critique de la part du spectateur.
Les dispositifs numériques ont permis d’élargir les horizons de la scénographie, en offrant des environnements interactifs où le corps et l’espace dialoguent de manière plus fluide. Cependant, ces innovations soulèvent des questions importantes sur l’équilibre entre une expérience sensorielle enrichissante et une surenchère visuelle pouvant altérer la profondeur artistique. L’opposition entre les approches minimalistes et les dispositifs excessivement technologiques a démontré que la scénographie doit veiller à préserver une certaine authenticité dans les relations qu’elle instaure avec le spectateur.
L’utilisation des théories de Jerzy Grotowski et Peter Brook, ainsi que des travaux d’Erin Manning sur la physicalité corporelle, ont permis d’enrichir cette réflexion, en soulignant l’importance d’un engagement authentique du spectateur dans un espace scénographique. Cette approche encourage une interaction active où l’expérience ne se limite pas à une simple observation, mais invite à une participation émotive et réfléchie.Les pratiques scénographiques de demain devront trouver un équilibre entre l’intégration des nouvelles technologies et une approche critique qui ne dilue pas la profondeur artistique. Les dispositifs numériques ne doivent pas être utilisés comme des artifices pour captiver uniquement l’attention visuelle, mais comme des moyens d’engager une relation dynamique avec l’espace, tout en respectant les limites du corps et de l’expérience humaine.
Dans ce contexte, la scénographie augmentée a le potentiel d’évoluer vers des formes artistiques qui valorisent l’interaction collaborative entre les spectateurs et les œuvres. Les futurs projets pourraient s’appuyer sur des méthodologies interdisciplinaires, intégrant des approches corporelles et sensoriels pour enrichir les dimensions émotionnelles et intellectuelles de l’expérience scénique.
Ce mémoire constitue une introduction à mon projet de diplôme, qui ambitionne de continuer cette exploration en développant un dispositifs scénographiques augmentés, mettant en avant les interactions sensorielles et critiques dans des environnements immersifs.Mon projet de diplôme vise à créer une installation immersive, combinant le mapping, l’impression 3D et des éléments faits main pour recréer un environnement hybride, inspiré de la nature. Ce projet cherche à renouer avec une expérience corporelle et sensorielle tout en explorant la frontière entre le tangible et le numérique.
Le spectateur sera immergé dans un univers contemplatif, où le physique et le numérique coexistent, soutenus par un travail sonore qui enrichira l’expérience. L’objectif est de proposer une immersion lente et organique, invitant à une réflexion profonde sur le temps, l’espace et la transformation continue de l’environnement.